L'ILE VOLCANIQUE DE PANTELLERIA

Gilles Brocard, Désiré Corneloup

(excursion du 27 au 30 septembre 2007) 

CADRE GEOGRAPHIQUE ET GEOLOGIQUE

  L'île de Pantelleria est la partie émergée d'un volcan de 40x30 km et 2150 mètres de hauteur, situé au centre du Canal de Sicile, à 85 km de la Sicile et à 70 km de la Tunisie. L 'île qui couvre 83 km 2 , est longue d'environ 13 km et large de 8 km au maximum. Elle culmine à la « Montagna Grande », 836 m , et au « Monte Gibele », 700 m , De nombreux appareils adventifs, les « kuddies », ponctuent les pentes. L'île est peuplée de 7 500 habitants qui vivent du tourisme et de l'agriculture, essentiellement de la vigne qui produit les vins spécifiques à Pantelleria, le « Moscato » et le « Passito ». L'habitation traditionnelle, encore largement répandue, est le « dammuso »,   petite maison de pierres volcaniques de forme cubique. La végétation est constituée de pins d'Alep, de maquis, de garrigues et de steppes herbacées. Le climat est méditerranéen : été chaud et hiver tempéré. La couleur généralement sombre des roches volcaniques a valu à Pantelleria le surnom de « Perle Noire de la Méditerranée ». Le calme et la rusticité de Pantelleria attirent non seulement les touristes occasionnels et les adeptes de la plongée sous-marine, mais aussi des stars qui y sont devenues propriétaires : Sting, Madonna, Carole Bouquet, Gérard Depardieu…

Pantelleria, avec les îles de Lampedusa, Linosa, et Lampione, forme l'archipel italien des Pélagies, un groupe d'îles volcaniques qui doit son existence à la présence d'un rift continental au centre du canal de Sicile. Pantelleria et Linosa sont des volcans endormis, qui sont nés au fond de fossés d'effondrement discontinus, étroits (30- 40 km ) et profonds ( -1700 m ), qui accidentent en son centre un Canal de Sicile, par ailleurs large ( 250 km ), plat et peu profond (100- 200 m ). Le fond du Canal remonte sur les épaulements de ces fossés d'effondrement, et émerge pour former les îles plates de Lampedusa et de Malte.   Le plancher du rift correspond à une croûte amincie dont l'épaisseur atteint une vingtaine de kilomètres, alors que l'épaisseur de la croûte est d'une quarantaine de kilomètres sous la Sicile ou la Tunisie. La structure de Pantelleria est déterminée par des failles orientées suivant   la direction des failles bordières des fossés   (NNO-SSE).

Pantelleria est donc constituée uniquement de roches volcaniques issues d'éruptions L'édifice volcanique aurait émergé il y a 500 000 ans, et a continué de croître de façon intermittente jusqu'à l'époque actuelle, la dernière éruption, marine, ayant eu lieu en 1891. La morphologie de l'île est marquée par l'existence de deux calderas emboîtées dans la partie centrale : la caldera de la Vecchia (114 000 ans) et la caldera Monastero, ou Cinque Denti  (45 000 ans), largement comblées par les produits d'éruptions postérieures.

 

HISTORIQUE DES ERUPTIONS

 

Du fait des nombreuses éruptions qui se sont succédé entre 500 000 ans et 200 000 ans, l'étude détaillée de cette période est rendue très difficile, les produits volcaniques, ignimbrites et coulées de laves dont l'épaisseur totale peut atteindre 300 m , se superposant et se masquant les uns les autres. Cependant,   un dôme et un dyke trachytique affleurant au pied de la falaise de Punta Salina ont pu être datés de 225 000 ans.

Il y a 118 000 ans, s'est produite l'une des rares émissions basaltiques de l'île, pour former le cône de Cuddia del Cat. Et 4 000 ans plus tard, une large éruption ignimbritique a conduit à l'effondrement du réservoir magmatique et à la formation de la caldera de la Vecchia de 42 km 2 , qui occupe la moitié de la surface de l'île.

A l'intérieur de cette caldera, se sont construits de nombreux édifices volcaniques, les produits d'éruptions pliniennes alternant avec les volcans boucliers, datés de 106 000, 79 000 et 67 000 ans.

Il y a 45 000 ans (45 ka) s'est produit un événement célèbre de l'histoire géologique de Pantelleria : l'émission du Tuf Vert, des téphras soudés spectaculaires d'un volume de 2,5 km 3 dont la mise en place est controversée (haute fontaine de lave ou rheoignimbrite ?) et qui a moulé le relief de l'île entière. Ce dépôt dont la composition va des pantellérites (rhyolite très alcaline) aux trachytes, constitue un excellent niveau repère pour l'étude géologique de l'île. Cette éruption conduisit à la formation   d'une nouvelle caldera   de 6x7 km au centre de l'île : la caldera Monastero ou Cinque Denti. La majorité des éruptions de laves acides depuis lors se sont produites dans cette caldera. Il y a 35 000 ans, l'activité reprend avec l'édification du Monte Gibele, un grand stratovolcan trachytique. Par la suite, des dizaines d'éruptions ponctuent les flancs du Monte Gibele d'édifices monogéniques, cônes et dômes pantelléritiques essentiellement. Ces éruptions commencent généralement par une phase explosive édifiant un cône de téphra, parfois préservé   (Cuddia de Gadir, Cuddia di Mita), mais plus souvent recouvert par la croissance de dômes de pantellérite. Ces dômes, d'abord circulaires, deviennent instables en cours de croissance, s'effondrent sur leur côté aval et libèrent de puissantes coulées à blocs. Les plus remarquables de ces dômes sont le Gelkhamar (22 ka), ans, le Gelsifer et le Khaggiar (9 ka). Entre 19 et 16 ka, une dizaine d'appareils volcaniques s'édifient sur la faille bordière de la caldera : Cuddia Mueggen, Gelsifer, Carrucate. Puis vers 12 ka, d'autres appareils colonisent les pentes externes de la caldera au NW de l'île. L'évènement le plus remarquable est associé à l'émission des coulées de pantellérite les plus jeunes de l'île il y 9 000 ans. Sous la poussée du magma, un flanc du Monte Gibele se soulève alors de 300 mètres tandis que des dômes de lave sortent le long des fractures délimitant le bloc soulevé. Ces dômes délivrent des coulées dont les plus longues atteignent la mer (coulée du Kagghiar). Le bloc soulevé devient la Montagna Grande , point culminant de l'île ( 836 m ). Ainsi, du sommet de la Montagna Grande , on domine le cratère sommital du Monte Gibele, de sorte que le Monte Gibele est sans doute le seul volcan au monde où, étant sur son flanc on domine le fond de son cratère !

Tandis que les émissions de lave acide se succèdent au centre de l'île, des émissions basaltiques ont lieu à terre et en mer dans la partie NO de l'île. A terre, les plus significatives donnent les coulées de   Punta San Leonardo (27 ka) et de Mursia (10 ka). L'activité aérienne est en sommeil depuis 9 000 ans, alors qu'un centre basaltique situé au large de l'île, au NE, est responsable des éruptions sous-marines historiques. La dernière éruption, en 1891, s'est produite à faible profondeur, des projections perçant la surface de la mer. Toutes les émissions basaltiques de Pantelleria se situent hors calderas, ce qui signifie que la chambre magmatique fait écran à la progression des filons basaltiques vers la surface, le magma acide des calderas interceptant le magma basaltique lorsque celui-ci atteint la chambre.

A l'heure actuelle, la présence du magma sous l'île se manifeste par de nombreuses sources thermales gazeuses (Specchio di Venere, Scauri, Nikka, Punta San Gaetano, Gadir…), par des émanations sulfureuses dans des grottes en bord de mer, par des activités fumerolliennes, un peu partout dans la caldera centrale et au cône de ponces de Cuddia di Mida, et par des jets de vapeurs, les « favare » (les deux spectaculaires jets de Favara Grande sur les flancs de Monte Gibele, le sauna naturel de Benikula, Sataria…).

Les coulées à blocs de panetellérite sont souvent vitreuses dans leur partie supérieure et basale. C'est de l'obsidienne. Cette obsidienne, nécessaire à la fabrication des outils primitifs, a attiré sur l'île les « sésiotes » (peuplades venant d'Afrique ou d'Espagne ?), au troisième millénaire avant J.-C. Ils ont construit sur l'île des tombes collectives de grande dimension, tel le célèbre Sese Grande. Il est vrai que, par la suite, c'est avant tout la position stratégique de l'île qui a attiré les hommes : Phéniciens, Romains, Byzantins, Arabes, Espagnols, Français et enfin, Italiens.

 

LA PANTELLERITE

  La pantellérite, omniprésente à Pantelleria, est une rhyolite hyperalcaline. Cela signifie que, dans cette roche, le rapport (Na+K)/Al est supérieur à 1 ; il y a donc déficit d'aluminium par rapport aux alcalins. La pantellérite contient de beaux phénocristaux d'anorthose, des microphénocristaux de pyroxène, de fayalite et d'un amphiboloïde en minuscules cristaux brun sombre, rare et propre à cette roche, la cossyrite (du nom romain de l'île, Cossyra), dans une pâte microlitique formée de quartz et de feldspath. Les meilleurs affleurements se trouvent sur le bord de la route qui longe l'aéroport et la Cala Cinque Denti. Bien que la pantellérite forme généralement des coulées très épaisses, couvertes de blocs parfois décamétriques, la teneur en alcalin par rapport à l'aluminium peut la rendre inhabituellement fluide pour une roche si acide. Cela explique en partie la très bonne soudure des éléments du Tuf Vert, la construction de spatter cônes et même la formation de tunnels de lave dans la trachyte du Monte Gibele !

EXCURSION GEOLOGIQUE

Pour parcourir géologiquement Pantelleria, il faut compter au moins trois jours. Mais si l'on ne veut pas passer à côté d'une mer cristalline, des sites archéologiques étonnants et des visites de caves (…à vin!) avec le meilleur accueil, il faut encore deux ou trois jours.

La première journée est consacrée aux parties hautes de l'île. L'excursion doit commencer par l'ascension de la Montagna Grande , dont on atteint le sommet en voiture. On y a une vue générale de l'île et l'on domine le magnifique cratère de Monte Gibele. On pourra échantillonner de beaux cristaux désolidarisés de leur gangue dans les trachytes qui affleurent au sommet. A quelques centaines de mètres, en suivant la crête au sud-ouest, il ne faut pour rien manquer la Grotta dei Briganti et son tunnel de lave en trachyte, dans lequel on descend par un petit escalier et une corde pour la sécurité (prendre une lampe). Par un sentier qui suit d'abord la crête vers le nord-est, puis descend à flanc sous la falaise sommitale, on atteint le col entre la Montagna Grande et le Monte Gibele. Il est assez pentu et équipé d'escaliers de temps à autre, tandis qu'une large piste conduit ensuite dans le cratère de Monte Gibele.

Rebroussant chemin jusqu'à la crête de la Montagna Grande , il est ensuite possible, par un sentier tracé dans les forêts de pins d'Alep et les arbousiers, de traverser à flanc l'épais maquis jusqu'au cône de téphra rhyolitique de Cuddia di Mida (9 ka), avec ses deux cratères emboîtés et sa ligne de faille d'où s'échappent en plein maquis des panaches de vapeur d'eau assez chaude. Sur le pourtour du cratère les traces de soufre sont nombreuses. Si l'on a un peu de temps on pourra visiter les deux volcans voisins de Cuddia Randazzo et de Cuddia del Gallo. Rejoignant la voiture, il est conseillé de descendre jusqu'à Sibà pour aller se délasser de la marche de cette journée très chargée dans un sauna naturel, la Grotta di Benikula, une cloche rocheuse pleine de vapeur sur le flanc ouest de la Montagna Grande d'où la vue sur les champs et la mer est magnifique en soirée. La température des dégagements de vapeurs va en croissant au fur et à mesure que l'on s'enfonce dans la grotte.

La seconde journée est consacrée à la visite des appareils éruptifs post-caldera et à leurs produits tels qu'ils affleurent le long des côtes. Si on loge dans le village de Pantelleria, on pourra, en partant vers le NE, admirer le lever du soleil et se mettre en appétit en visitant d'abord les fines coulées basaltiques de Bue Marina à 1 km au NE du centre ville en bord de mer. Agées de 29 ka (mais si fraîches !), elles reposent directement sur le puissant Tuf Vert prismé (45 ka). Reprenant la voiture le long du littoral, mais cette fois au SO de Pantelleria, on traversera les coulées basaltiques récentes de Cuddia Rossa (9 ka). En contrebas de la route, près de la mer,   une tranchée a été percée, ce qui permet de voir, sur une dizaine de mètres de hauteur, les alternances de coulées scoriacées et laminaires et de remarquer même de petits tunnels de lave. Juste au-dessus se trouve, taillée dans un cône de scorie, une carrière de pouzzolane où affleurent des orgues basaltiques aux imposants prismes quasi métriques. Le sommet de ce volcan a été démantelé par les extractions, par la construction de casemates et par leur destruction durant les bombardements américains en 1943, entraînement et prélude au débarquement allié dans le sud de la Sicile. A peine plus loin, à la Punta Fram , une immense carrière exploite en bord de mer une épaisse coulée prismée de pantellérite issue du dôme Gelkhamar. La coulée repose sur une brèche d'obsidienne, formée par la chute des blocs devant le front croulant de la coulée, puis recouverts par celle-ci lors de sa progression. Ces brèches, à leur tour, reposent sur le Tuf Vert qui moule un cône basaltique strombolien préexistant, parfaitement conservé sous sa carapace de Tuf Vert soudé.

C'est à proximité que se trouve la nécropole néolithique de Sesi, édifiée il y a 3 800 ans   par les Pélasgiens (peuplade préhellénique)   avec des blocs de pantellérite. A visiter absolument. On peut ensuite envisager un arrêt à la Grotta di Sataria, aménagée autrefois en petit therme littoral. Les thermes sont abandonnés et dégradés,   et les bassins d'eau chaude ont une propreté et des qualités douteuses. L'intérêt est surtout géologique, le Tuf Vert recouvrant, telle une cloche, un cône de blocs ponceux à la structure très aérée. Les ponces sont recuites sur une épaisseur de 20 cm au contact avec le Tuf Vert.

Traversant l'île pour rejoindre la côte nord, on longe le Tuf Vert prismé le long de l'aéroport, avant de redescendre sur la côte. En la suivant, vers l'est, on arrive bientôt à la magnifique Cala de Cinque Denti, dont les amoncellements de blocs sous-marins révèlent l'exceptionnelle transparence des eaux autour de Pantelleria. Le rempart de la caldera qui a émis le Tuf Vert est ici parfaitement visible dans la falaise côtière. L'excursion au phare désaffecté de Punta Spadillo constitue le must de la journée. Cette péninsule correspond à l'entrée en mer de la grande coulée de pantellérite du dôme Kagghiar (9ka). Ce lieu, inculte, est hérissé de blocs qui émergent du maquis. La partie supérieure de la coulée, qui a refroidi le plus vite, est une obsidienne porphyrique, tandis que le cœur est non vitreux et prismé, les prismes ayant des sections de 20 à 40 cm . Du phare, accroché dans des blocs tourmentés noirs qui surplombent la mer, on descend vers les deux lacs de l'Ondine. Ces petits lacs paisibles, d'une vingtaine de mètres de diamètre et de moins de trois mètres de profondeur, sont hypersalés et situés à deux mètres au-dessus du niveau de la mer. Ce sont comme des conques d'eau transparente et chaude posées sur un pavage de prismes au cœur de la coulée de pantellérite et qui contrastent avec la mer toute proche, agitée et sombre.  

Quittant la Punta Spadillo , on pourra aller se débarrasser des sels de mer dans le lac Specchio di Venere (le Miroir de Vénus !), aux eaux vert émeraude ;   il est entouré de plantations d'agrumes et surplombé par le rebord de la caldera Vecchia. Le lac a un diamètre d'environ 400 m et une profondeur maximum de 12 m . Sur le bord du lac, une source d'eau sulfureuse dont la température varie de 18°C à 50°C barbotte dans une fange blanchâtre aux propriétés thérapeutiques et cosmétiques reconnues. C'est là que Vénus aurait trouvé la source de sa beauté ! Tout près se trouvent les vestiges du Temple de la Fertilité.  

Reprenant la côte, on peut descendre dans la crique qui abrite le magnifique petit port de Cala Gadir. Il est surplombé par l'édifice volcanique de Cuddia del Gadir, un cône de ponces recouvert de coulées pantelléritiques. Dans un bassin du port les gens se baignent dans des eaux soufrées bulleuses.

La journée pourra s'achever sur les bords de la Cala Levante , certainement le point le plus touristique de l'île. A droite, le fameux Arco dell'Elefante plonge dans la mer. Il s'agit d'un cône scoriacé recouvert de Tuf Vert. La mer a évidé le cœur scoriacé, laissant le Tuf Vert former une arche.   A gauche, la longue échine de la   Punta Tracino s'avance au large et se prolonge par l'îlot pointu de Faraglione. Entre les deux, les coulées descendent en pente douce vers la mer aux eaux limpides où la visibilité peut   atteindre les 30 m de fond. Si l'on dispose d'encore un peu de temps, en regagnant Pantelleria par la Piana di Ghirlanda et par Scauri, sous le Monte Gibele, on pourra gagner, après une petite heure de montée et par un beau sentier empierré, le lieu le plus charmant de l'île, la Favare Grande  : deux jets de vapeurs à des températures de 70°C à 100°C y jaillissent avec force, dans un cadre serein de petits champs empierrés sous les escarpements de la montagne.

Ce programme peu paraître très chargé, mais, l'île est petite. Les sites sont proches les uns des autres : quelques dizaines de minutes en voitures, ou tout au plus une heure à pied.

 

La troisième journée est consacrée essentiellement à l'activité ancienne de l'île. Repartant le long de la côte NE, on pourra monter en voiture au village perché de Bugeber voir les coulées de scories et de blocs du volcan Cuddia di Gelsifer, puis au village isolé de Mueggen au pied du Monte Gibele voir ses tombes byzantines et sa Madone de la Paix. On se trouve alors au milieu de l'importante zone viticole du Moscato.  

Reprenant la route sur le fond comblé de la caldera de Monastaro (Piana di Ghirlanda) on voit l'un derrière l'autre les remparts des deux calderas : le plus élevé, celui de la Vecchia est recouvert de Tuf Vert et il recoupe le flanc ouest de la Serra di Ghirlanda. Deux dépôts de ponces séparés par un paléosol sont plaqués à la base de ce premier rempart. Le rempart de la caldera de Monastero se trouve en contrebas. Des coulées trachytiques venant du Monte Gibele viennent buter contre ce dernier rempart.

Reprenant la côte vers le SE, on contourne par l'extérieur la Serra di Guirlanda. Dans ces parties anciennes de l'île, l'érosion marine a eu le temps de tailler une côte haute et escarpée. La route monte au-dessus de la côte est, qui n'est accessible qu'en quelques endroits. Le plus bel accès est la Balata dei Turchi. Le chemin pour y accéder n'est pas goudronné, seulement empierré mais relativement bien entretenu. Mieux vaut parcourir à pied le dernier kilomètre qui permet d'atteindre la mer et les coulées de rhyolites et d'obsidiennes qui plongent dans l'écume des flots. On se trouve alors immédiatement sous d'impressionnantes falaises de quelque 250 m de haut où l'on peut lire toute l'accumulation des produits volcaniques depuis plus de 150 000 ans.

La route côtière, continue de s'élever et passe près du site vertigineux qui expose le rempart enfoui de la caldera la plus ancienne, dans les falaises de Salta la Vecchia. On y voit les couches indurées du   Tuf Vert dont l'épaisseur peut atteindre une vingtaine de mètres. Si l'on n'est pas sujet au vertige, on pourra même s'approcher au bord de la falaise et cheminer avec précaution le long de la corniche. D'autres sources chaudes se trouvent, non loin de là, à Punta di Nikka. En bord de mer, elles jaillissent sous la couche de Tuf Vert omniprésente.

Ces grandes falaises littorales et les nombreuses grottes marines qu'elles contiennent ne s'apprécient pleinement que depuis la mer, et l'on pourra utilement substituer à cette journée ou effectuer le jour suivant le tour de l'île en bateau, en partant de Pantelleria. Selon la saison, on aura le choix entre le circuit touristique ou un circuit plus personnalisé avec une embarcation privée.

AUTOUR DE PANTELLERIA

Depuis Porto Empedocle en Sicile, on peut se rendre   sur les   autres îles Pélagie : Linosa et Lampedusa en particulier. Linosa, comme Pantelleria, est le somment émergé d'un volcan sous-marin de plus de 1500 mètres de hauteur, à peine émergé. L'île est toute petite : 2x3km, point culminant 195 m . Elle est composée de cônes surtseyens et stromboliens basaltiques à la morphologie bien conservée. On ne lui connaît pas d'éruption historique.

Entre Pantelleria et la côte sicilienne se trouve un centre éruptif très peu profond connu depuis l'Antiquité pour ses éruptions marines, et fréquemment appelé ‘champs phlégréens de la mer de Sicile'. Sa dernière éruption, en 1831, a donné lieu à la spectaculaire naissance et mort de l'île Ferdinandea, dont il faut conter l'histoire.

Le 28 juin 1831, à 50 km NE de Pantelleria, émerge une île volcanique qui ne cesse de grandir à la faveur des éruptions, et ceci jusqu'à la fin août quand les éruptions s'arrêtent. L'île surtseyenne atteint alors 1 km de diamètre. L'apparition d'une nouvelle terre dans un lieu aussi stratégique que le Canal de Sicile ne peut qu'attirer les convoitises ! Le gouvernement sicilien s'en empare au nom de son roi Ferdinand, mais les Anglais, installés non loin de là, à Malte, la revendiquent, parviennent à y planter le drapeau de Sa Majesté entre deux éruptions et l'appellent Graham. Enfin, Constantin Prévost de l'Académie des Sciences de Paris, qui passait par là, s'en empare au nom de la proximité des colonies françaises et l'appelle Julia. Les explosions continuent, rendant l'île inabordable, tandis que les ennuis diplomatiques vont s'amplifiant. Néanmoins, les ultimes éruptions, et l'érosion marine conduisent à l'effondrement de l'île dans la mer. Le 28 décembre 1831, elle met tout le monde d'accord en disparaissant définitivement sous les flots.

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

CIVETTA & al. L'île de Pantelleria. Guide d'excursion du « Dipartimento di Vocanologia e Geofisica, Napoli. 1999

KRAFFT & de LAROUZIERE.   Volcans d'Europe et des Canaries. Delachaux et Niestlé. Lausanne. 1999. Pp 330 à 334.

MAHOOD & HILDRETH. Nested calderas and trapdoor uplift at Pantelleria, Strait of Sicily . Geology, v. II, Dec. 1983. Pp 722 à 726.

ORSI & al. The recent explosive volcanism at Pantelleria. Geologische Rundschau. N° 80 1991.

PANTELLERIA. Guide touristique de l'Agence de Voyage et de Tourisme. La Cossira. Pantelleria.

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