LES PIERRES REGIONALES qui ont servi pour  CONSTRUIRE GRENOBLE

 

19/10/07

 

Wolf Fischer qui nous accompagne a créé un site où ce sujet des pierres régionales ayant servi pour construire les maisons de Grenoble, sujet géologique un peu particulier :  http://geopatrimoine.free.fr

Types de roches utilisées.

Départ de l’ancienne carrière de la Bastille (au départ de la Via Ferrata). Cette excavation entourée de falaises a été creusée pour construire les immeubles grenoblois. La roche est du calcaire tithonique bien compact ou du kimméridgien. Le calcaire tithonique présente des strates d’épaisseur moyenne intéressante pour tailler des pierres pour la construction. Le calcaire du kimméridgien présente des strates un peu moins épaisses. Cette roche est couramment appelée calcaire de la Porte de France. La patine de cette roche est presque blanche, ce calcaire est de grain fin et l’intérieur d’une cassure fraîche est gris sombre.

 

L’urgonien est très présent dans la région mais il présente deux inconvénients : les strates sont très épaisses ce qui est peu pratique pour des éléments de construction et avec l’usure, il se polit très bien et devient extrêmement glissant, il paraît exclu de l’utiliser pour tailler des bordures de trottoir.

 

Le sénonien, calcaire au grain plus gros est peu utilisé à Grenoble. Ses strates souvent peu épaisses sont favorables à l’exploitation en lauzes.

 

Le calcaire du Bec de l’Echaillon donne de très belles pierres de construction utilisées pour les plus beaux bâtiments. Il fournit du beau calcaire blanc ou rose, l’exploitant des carrières extrait aussi de l’urgonien à proximité qu’il a dénommé abusivement de l’Echaillon jaune. Ces roches sont exportées dans toute la France et même à l’étranger.

 

Le calcaire du Fontanil a aussi exploité pour ses pierres, la surface est grise un peu bleutée si elle est exposée à l’air depuis longtemps (patine), sinon un cassure fraîche est rouille très claire. Cette roche est responsable de la couleur grise assez sombre des rues des vieux quartiers. (information que j’ai eue lors d’une visite de la vieille ville avec un conférencier: la ville de Grenoble était régulièrement envahie par les inondations, pour limiter les dégâts il est devenu obligatoire de construire le premier étage des immeubles en pierres ce qui explique l’utilisation massive de pierres régionales).

 

La molasse a aussi été utilisée (gré glauconieux à ciment calcaire), on en retrouve par exemple rue St Laurent. C’est une pierre tendre et par exemple les rebords de fenêtres en molasse non entretenus (?) ont pratiquement disparus. La carrière se trouvait à la Gachetière après St Egrève.

 

Le travertin (tuf calcaire) a été peu utilisé à Grenoble, il venait de La Sône vers St Marcellin. Le nom de travertin vient de Travertino, ville prés de Rome où cette pierre était exploitée.

 

 

A Travers les rues.

 

La Bastille a été construite avec des pierres prises sur place c’est à dire du calcaire de la Porte de France.

 

On retrouve cette roche dans l’éperon rocheux de la Porte de France : calcaire à grains fins dont la patine et blanche et dont la cassure est gris foncé, cette blancheur serait due à tous les trous microscopiques creusés par l’eau de pluie qui favoriseraient la réflexion de la lumière. La surface a un aspect tacheté et parfois bréchique. On y trouve quelques ammonites ou des tests.

 

Le monument de la Porte de Franceest décoré par une alternance de pierres blanche (urgonien) et de pierre grise (calcaire de la Porte de France).

 

En poursuivant le long de l’Isère vers l’amont, juste après les rochers, on trouve les deux piliers d’un portail très érodés et dont la surface s’écaille. La couleur grise de la surface qui devient rouille claire lorsqu’on retire une écaille est typique du calcaire du Fontanil. Soit l’usage trop important des explosifs en carrière a fragilisé la roche lors de l’extraction, soit les pierres ont été taillées dans une strate un peu plus argileuse.

 

Les colonnes monobloc de la bâtisse qui suit et qui est en face du pont sont aussi en calcaire du Fontanil mais il est en meilleur état probablement parce que plus calcaire. Le calcaire de la face externe est plus érodé qu’à l’intérieur et le bouchardage a presque disparu sur les faces exposées aux intempéries alors qu’il subsiste en bon état sur la face abritée. Les bordures au sol délimitant la partie plus élevée du sol de la bâtisse sont en calcaire urgonien très compact, blanc un peu jaune et très poli (certainement bien glissant par temps de pluie).

 

Les piliers de l’entrée du jardinqui monte à la Bastille ne présentent pas les caractéristiques des calcaires environnants, ce peut être des blocs venant de Montalieu. Les stylolithes(formés sous l’effet de la contrainte) sont très visibles car leur rebord a été plus attaqué par l’érosion que la masse du calcaire. Il est probable que les carriers aient vu ces stylolithes et qu’ils aient pris soin de les placer à l’horizontale.

 

Au-delà sur le quai St Laurent, la grande bâtisse qui est une ancien fort ou bâtiment militaire présente des rebords à la surface un peu bréchique caractéristique du calcaire de la Porte de France. Autrefois, il y avait un petit port à ce niveau et ce fort devait être au bord de l’Isère; la route de Lyon passait au-dessus du Rabot. La façade latérale de ce bâtiment utilise des blocs d’urgonien (ou Echaillon blanc, il est difficile de faire la différence).

 

De nombreuses maisons sont construites avec un premier étage fait de grosses pierres grises présentant par endroit (plutôt vers les rebords mais pas toujours) des taches orange clair : ce sont des calcaires du Fontanil. Parfois le bord supérieur ou inférieur de blocs est un peu délité: ceci signifie que la pierre a été extraite à la limite d’une zone plus marneuse. A la limite entre le premier et le second étage des immeubles, de nombreux rebords sont très érodés : ils avaient été taillés dans de la molasse plus tendre mais ils n’ont tenu dans le temps (fonction l’exposition qui joue un grand rôle dans l’érosion).

 

La Fontaine du Lion, quai Perrière, est sculptée dans un énorme bloc urgonien. On y voit de nombreux fossiles : polypiers, corail…

 

Dans la rue St Laurent, plusieurs façades de maisons anciennes parfois délabrées permettent de voir le peu qu’il reste des rebords de fenêtres en molasse après quelques siècles. Les carriers et maçons ont pris soin de respecter la polarité (haut bas) de la roche : peut être cela a-t-il un peu amélioré la tenue de la roche.

 

L’église St Laurent est construite en molasse ce qui lui donne une couleur particulière. Les colonnes non changées aux fenêtres et les sculptures sont en mauvais état. La base de l’édifice est en calcaire clair, plutôt du kimméridgien que du tithonique.

 

Au-delà de l’entrée du musée de l’église St Laurent, un grand bâtiment raccordé à la casemate est surmonté de créneaux taillés dans du travertin. Les autres pierres de ce bâtiment sont en calcaire de la Porte de France, plusieurs de ces blocs présentent des fentes de tension remplies de calcite ce qui est dans la région un indice fort de calcaire du jurassique supérieur tithonique ou kimméridgien). Les caniveaux de la place sont taillés dans de l’urgonien.

 

Notre itinéraire remonte ensuite le quai de l’Isère pour revenir à la passerelle St Laurent. Le parapet qui longe la rivière est construit avec de gros blocs d’urgonien riche en fossiles. L’érosion a manifestement bien attaqué la surface de ces pierres en émoussant les angles des parties taillées et en mettant en relief les fossiles : gastéropodes, lamellibranches, rudistes…

 

Les piles de la passerelle St Laurent sont taillées dans un urgonien riche en fossiles. En amont, le pont sur l’Isèreest certainement de l’urgonien vue sa blancheur.

 

Nous arrivons à l’ancien palais de justice par le coté. Les annexes latérales ont été construites avec des pierres d’un calcaire qui pourrait venir de Crémieu ou Montalieu (peut être oolithique).

 

La façade du palais de justice tout juste ravalée joue du contraste entre le gris qui paraît foncé du calcaire du Fontanil et de la blancheur du calcaire de l’Echaillon utilisé pour la partie centrale.

 

En remontant vers le jardin de ville, les molasses utilisées dans la construction du théâtre sont en bon état : meilleur entretien ou plutôt exposition plus favorable (ou bonne restauration ?).

 

De l’autre coté de la rue c’est l’hôtel Lesdiguières avec en haut une échauguette en travertin fort érodée et à coté une grosse tour en molasse.

 

Dans le pilier W du portail d’entrée dans le jardin de ville sur le coté de l’hôtel Lesdiguières, un bloc jaunâtre fait tache au milieu des autres blocs de calcaire urgonien presque blanc. En regardant de prés, des orbitolines sont visibles dans les zones les plus ocres de la face de ce bloc et il est vraisemblable que ce bloc d’urgonien ait été prélevé à la limite d’une couche à orbitolines plus argileuse et que cela ne se soit pas vu à l’époque. Cette face était néanmoins plus fragile vis à vis de l’érosion d’où cette différence.

 

Le porche d’entrée de l’église réformée à l’angle des rues Hébert et Fourier est encadrée de deux colonnes de calcaire rose du Bec de l’Echaillon. Elles sont en mauvais état mais ce que nous pouvons voir sur la face du coté du mur montre qu’elles devaient être fort belles. On retrouve des colonnes de ce type à l’église de La Monta près de St Egrève.

 

Nous regagnions ensuite la place de Verdun avec tous ces bâtiments construits en pierres dans le même style. La partie basse est construite avec des blocs de calcaire de la Porte de France dont les surfaces horizontales sont très érodées. Au-dessus des blocs d’urgonien ont été utilisés pour la base des murs. Au-dessus encore, les montants en pierre qui ressemblent à du béton mais on peut voir quelques fossiles, il s’agit en fait de blocs de gré d’une autre région, peut être du sud de la France.

 

C’était une belle balade géologique citadine. 

 

 

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